Puisque tout le monde y va de son expérience du 15 juillet 2016, je vous livre le mien. En fait le mien n’a rien d’extraordinaire puisque j’étais en France. Mais j’ai appris la nouvelle à petit feu, je regardais le programme en direct de Turgay Güler sur ÜlkeTv.
Un moment il regarde son portable et nous apprends qu’une colonne de soldat a fermé le pont du Bosphore et les rumeurs parlent d’un putsch en cours. Il sourit et dit qu’il doit s’agir d’une opération anti terroriste. Après une page de pub, on retrouve Turgay Güler et ses invités avec des visages graves presque décomposés.
Il s’agit bien d’une tentative de putsch. Le programme est évidemment complètement détourné et j’assiste en direct aux images qui parviennent via les réseaux sociaux. Je suis abasourdis et sous le choc, le sentiment d’impuissance ne m’aide pas.
Nous sommes scotchés face à la télé, enfin moi non puisque je suis incapable de m’asseoir, je tourne en rond, je suis rongé de l’intérieur.
Je pensais que les coups d’état étaient une période révolue en Turquie. Aussi, je pensais à toutes ces avancées que la Turquie avait accumulée.
Je pensais bien sûr à mes proches de Turquie. Au bout d’un moment je me retrouve seul, incapable d’aller au lit, c’est vers 6 heures du matin que je comprends que le putsch est en phase d’échouer, grâce notamment au courage du peuple turc.
À cet instant je n’imaginais pas qu’il y avait autant de morts et blessés. Après qques heures de sommeil, je rallume la télé et cette fois j’étais persuadé que nous avions gagné. La fierté avait remplacé le choc et le dégoût.
Le manque de solidarité des pays européens
Mais le sentiment de dégoût reviendra avec l’attitude des pays supposés amis de la Turquie. Moi qui suis un franco-turc, aurais voulu que mon pays d’adoption condamne dès les premiers instants cet acte odieux au lieu d’attendre son issue.
Et je ne vous parle même pas des commentaires journalistiques des jours suivants. Dire que le 15 juillet 2016 a été un tournant dans ma vie ne serait pas exagéré. Alors que j’attendais un minimum de solidarité, les déclarations abjectes ou au mieux ambiguës m’ont profondément blessé et poussé une fois de plus à me questionner sur ma place ici en France. Pour la petite anecdote, 1 an plus tard, naïvement, j’avais voulu faire une exposition photo retraçant ces événements. Un peuple s’est levé au péril de sa vie pour sa démocratie, qui pourrait interdire une si belle initiative ? La ville où j’habite l’a pourtant fait …
Que nos martyrs reposent en paix.
Murat Büyük