Depuis le début de la crise du coronavirus, la Turquie joue à fond la carte de la solidarité avec les pays qui font la demande d’aide médicale.
Cette attitude n’est pas très étonnante dans la mesure où la Turquie est le pays qui réalise le plus d’aide à l’étranger, par rapport à son PIB.
En revanche, ce qui a changé depuis quelques semaines, c’est que même les pays les plus développés font appel à la générosité d’Ankara.
Kits de dépistage, médicaments, masques, respirateurs, combinaison de protection autant de matériel qui sont devenus des outils indispensables dans la lutte contre la pandémie de coronavirus.
Or, aucun pays n’y était vraiment préparé. La plupart des pays pensait faire une bonne affaire en continuant de se fournir en Chine concernant ces matériaux stratégiques. Mais la donne a changé avec le besoin de chaque pays et on a frôlé des incidents diplomatiques notamment par la saisie des masques destinés à l’Italie et l’Espagne par la France.
Par contre, la Turquie qui a su garder son industrie de production dans le domaine médical n’a pas eu besoin de recourir aux pays tierces en dehors de tests de dépistages rapides.
Malgré les besoins grandissants sur son propre sol, la Turquie a répondu favorablement aux demandes des autres pays qui l’ont sollicité pour recevoir de l’aide médicale. Par ailleurs, la Turquie avait décidé de distribuer gratuitement des masques à sa population par un décret présidentiel le 9 avril.
Dans la foulée, le ministre turc de la Défense nationale, Hulusi Akar a déclaré à la presse que l’armée allait produire 10 millions de masques par semaine.
En plus de population, la Turquie pourra donc aider d’autres pays en cas de besoin.
Plus d’une centaine de pays ont sollicité la Turquie
Lors d’un entretien sur une plateforme sociale, le 14 avril, Yavuz Selim Kiran, vice-ministre turc des Affaires étrangères, a déclaré qu’au total 104 pays avaient sollicité l’aide d’Ankara.
Jusqu’à présent, « le Président Recep Tayyip Erdogan a donné le feu vert pour 34 pays et continue de le faire dans la mesure du possible », a-t-il expliqué.
Ainsi, dès le mois de février, la Turquie a envoyé 200 mille masques, lunette de protections, combinaisons, désinfectants et des gants à la Chine qui était durement touché à cette période.
Par la suite, son voisin, l’Iran qui a vu se multiplier les cas positifs a fait appel à la Turquie pour recevoir des kits de tests, des combinaisons, lunettes et masques. Le 24 mars, un avion-cargo a livré tout le matériel demandé.
Lors d’une conférence de presse tenue le 21 mars, le ministre turc de la Santé, Fahrettin Koca, a déclaré que la Turquie avait fourni aux États-Unis 500 mille kits de test de coronavirus.
Depuis, le début du mois d’avril, la Turquie enchaîne les aides médicales. Ainsi, le 1er avril, l’avion-cargo des Forces turques de type A-400M chargé de l’aide médicale a atterri à la base aérienne Torrejon en Espagne puis vers la base aérienne Pratica di Mare en Italie.
La cargaison comptait notamment des masques de protection, des combinaisons de protection, des solutions de désinfection et des milliers d’autres produits fabriqués et confectionnés en Turquie.
Messages d’espoirs sur les colis
En plus des colis, la Turquie a souhaité aussi apporter un peu d’espoir aux personnes touchées. En ce sens, sur les colis envoyés on pouvait lire une citation du célèbre penseur et poète mystique turc, Mevlana, traduite en italien et en espagnol :
« Derrière le désespoir se cachent de nombreux espoirs. Derrière l’obscurité se cachent de nombreux soleils. »
Mevlana
Enfin, la citation se terminait avec un message adressé aux peuples espagnols et italiens, « avec amour de la part du peuple Turc ».
Une semaine plus tard, une nouvelle cargaison partait pour des pays proches de la Turquie. Ainsi, le pays en envoyé le 8 avril du matériel et des équipements médicaux à 5 pays des Balkans : la Serbie, la Bosnie-Herzégovine, le Kosovo, le Monténégro et la Macédoine du Nord.
Deux jours plus tard, deux nouveaux pays ont reçu de l’aide médicale : la Libye et le Royaume-Uni. Encore une fois, c’est un avion-cargo militaire A400M des Forces armées turques qui a livré le matériel à Londres. Comme pour l’Espagne et l’Italie, le même message de solidarité se trouvait sur les colis.
« Nous remerciement beaucoup notre ami et notre allié la Turquie pour cette offre généreuse. Ces équipements de protection sont d’une importance vitale pour le personnel de santé britannique qui sont au premier rang de la lutte conte le Covid-19 » a déclaré l’ambassadeur britannique à Ankara, Dominick Chilcott.
Israël et l’Arménie sollicitent également la Turquie
Par ailleurs, malgré des relations tendues, Ankara a approuvé la vente de matériel médical à Israël pour des raisons humanitaires et que Tel-Aviv ferait la même chose en autorisant une aide turque similaire aux Palestiniens.
Selon le porte-parole de la Présidence Turque, Ibrahim Kalin, l’Arménie avait aussi demandé de l’aide. Cette affirmation a été démenti par l’Arménie. Mais d’après le site d’information Straturka qui a analysé les données de vols, un avion de cargo arménien a bien atterri en Turquie sans plus de détails.
Par ailleurs, l’Azerbaïdjan, la Bulgarie, la Colombie, l’Allemagne, la Hongrie, l’Indonésie, l’Irak, Chypre du Nord, le Pakistan, les Philippines, la Pologne, la Tunisie, le Yémen, le Kirghizistan, la Géorgie, Koweït et l’Irlande ont également bénéficié de diverses aides médicales de la part de la Turquie.
L’aide médicale de la Turquie : une stratégie?
Pour certains détracteurs de la Turquie, derrière cette aide médicale il y a une stratégie diplomatique. Selon le Télégramme, il s’agit pour Erdogan de prendre « une revanche symbolique » sur l’Empire Ottoman qualifié autre fois de « l’homme malade » par l’Europe. Selon ce média, il s’agit pour la Turquie de démontrer que désormais « l’homme malade c’est l’Europe ».
Or, lors d’une allocution télévisée le 25 mars, Erdogan avait déclaré que la « Turquie allait continuer d’être l’espoir des plus démunis comme elle le fait depuis longtemps ».
En effet, la Turquie est un pays musulman. Dans ce cadre-là, l’Islam impose la solidarité comme une principe fondamentale de ses valeurs. D’ailleurs, un hadith (une citation) du prophète Mohammed explique « n’est pas des nôtres celui qui dort rassasiés alors que son voisin a faim ».
C’est toujours ce principe qui a conduit la Turquie à avoir un réflexe d’assistance humanitaire. C’est pourquoi, elle accueille plus de 4 millions de réfugiés sur son sol et aide tous les pays qui font la demande de l’Afrique à l’Asie.
Fatih KARAKAYA / Rédaction avec Agence Anadolu