La Turquie a pour les moments évités de prendre des sanctions contre la Russie après qu’elle est décidée d’envahir l’Ukraine. Mais même sans mesure coercitive le pays va subir certaines hausses de prix.
L’Ukraine et la Russie pèsent lourd dans le marché mondial des céréales : les deux pays représentent 29% des exportations de blé mondial (17% pour la Russie, 12% pour l’Ukraine). Avec la guerre, de nombreux pays dont la Turquie risque de subir de plein fouet l’envolée du prix de la céréale. La majorité de ses importations de blés proviennent de Russie et d’Ukraine.
Selon les chiffres du ministère de l’Agriculture, en 2020-2021, 78 % des importations de blé turcs provenaient de Russie, 9 % d’Ukraine et 13 % d’autres pays. Il y a encore quatre ans, la Turquie produisait 107% de ses besoins en blé. Cette inversion vient du fait des politiques agricoles erratiques qui ont fait plonger la production : manque de soutien aux agriculteurs, imposition de prix plafond, réaffectation des terres agricoles pour l’immobilier, l’industrie etc.
L’Ukraine vend en outre la moitié de l’huile de tournesol mondiale. L’Ukraine produit ainsi 7 millions de tonnes d’huile de tournesol par an, et en exporte 6,7 millions. Quant à elle la Turquie à une consommation annuelle est de 900 000 tonnes d’huile de tournesol alors qu’elle en produit d’entre 400 000 et 450 000 tonnes.
La Turquie a aussi des problèmes énergétiques. Concernant le pétrole, la Turquie en importe pour 29,09% d’Irak, 21,8% de Russie, 8,23% du Kazakistan, 7,9% d’Arabie Saoudite, 7,02% de Norvège et 26,58% d’autres pays.
Pour le gaz naturel la Turquie importe pour 33,59% de Russie, 24% d’Azerbaïdjan, 11,58% d’Algérie, 11,06% d’Iran, 2,82% du Nigeria et 16,95% d’autres pays.
La Turquie connaît déjà une hausse du prix du pain et un flambé du prix de l’huile de tournesol. Les clients appréhendent en faisant des achats préventifs et les commerçants enlèvent cette denrée des rayons d’hypermarchés pour les revendre lorsque les prix auront suffisamment augmenté.
Malgré une aide du gouvernement pour les factures d’électricité et de gaz les citoyens turcs ont de plus en plus de mal à se chauffer. Avec la valeur du brent à 118.03 $, faire le plein à la station-service choque le citoyen et même les pros Erdoğan.
Les prochaines présidentielles en Turquie auront lieu en juin 2023 mais la guerre en Ukraine et ses implications sur l’économie turque vont mettre le président Recep Tayyip Erdoğan dans une situation fragile. Erdogan a-t-il eut raison de refuser la perche tendue par l’opposition pour des présidentielles anticiper ?
Fatih TUFEKCI